Lundi après les cours j'ai eu l'envie de passer à mon collège. Officiellement pour chercher mon diplôme de brevet, officieusement parce que j'avais envie de revoir mes profs.
A 15h35 j'y étais presque. J'étais pétrifiée, c'était comme la rentrée en 6ème. C'est bien stupide pourtant, il n'allait rien m'arriver, pourquoi stresser ?
Redescendre cette rue. Cette rue où je passais en petite moyenne 20 fois par semaine, et ça pendant juste 5 ans...
Le portail. Ceux qui traînent devant à attendre l'ouverture de 16h, ceux qui attendent leurs amis, ceux qui sèchent les cours... Ils me regardent tous de travers. Je suis à deux doigts de faire demi-tour. Je n'aime pas faire face à mon passé. Qu'est-ce que je fais ici ? Le portail à code pour empêcher les sécheurs les plus fainéants qui ne se foulaient pas à passer par dessus le grillage... Moi je connaissais le code ahah. Je vous le dis, mais c'est un secret entre nous... Le code c'était 1234# (moi je suis prête à parier que c'est parce qu'ils sont tellement stupides qu'ils ont pas trouvé comment changer le code par défaut). Voila maintenant si l'envie de voler des craies blanches ou modifier la liste des absents de mon ancien collège vous prend, vous avez plus qu'à vous faufiler la nuit et à vous la jouer James Bond pour passer entre les rayons lasers lumineux d'alarme... Bref, je suis quand même toujours devant ce fichu portail, j'ose pas essayer le code, alors j'appuie sur le bouton. «La vie scolaire, j'écoute» «Heeuuu, heu, vous pourriez ouvrir le portail s'il vous plait ?...». Et me voila dans mon collège.
Son odeur. C'est vrai, j'y avais jamais fait attention mais il y'a une odeur spéciale ici. Peut être l'odeur de l'espoir des élèves, parce que je suis à côté du tableau des profs absents ? (tout l'espoir que MOI j'ai pu y déverser devant cette fichue feuille !!).
Et l'administration. La femme très gentille, une nouvelle. Elle me demande de patienter. Dans le couloir j'entends la principale qui hurle. C'en est comique. La femme de l'accueil qui discute un peu avec moi, quand je lui dis où je suis à présent elle me demande «Oooh, avec M Bueno ?». Rien compris. Elle me dirais «K Bueno», alors oui il y'a des Kinders Bueno dans mon lycée, mais Monsieur Bueno en personne ?? Et moi je ris  comme une imbécile d'un pauvre inconnu.
Mais enfin voila mon diplôme qui arrive, je plaisante même avec le principal adjoint, qui l'année dernière encore m'effrayait tant... Ne pensez pas «Tant d'effort pour une feuille cartonnée DIPLÔME NATIONAL DU BREVET», parce que mon brevet il me manquait 40points et que j'ai décroché un 75/120 sans rien réviser. Ahah ohoh ihih.
Je me retrouve à nouveau dans ce hall. Je décide de prendre position sur le banc entre le bureau de la CPE et la salle des profs. Je sors avec ô grande joie mon lecteur mp3 (tout appareil électronique est interdit dans l'établissement gnagnagna, mais cette année j'ai pas eu à le signer leur règlement de merde).
D'abord, c'est ma prof de français lors de ma première 4ème qui passe. On discute 2 ou 3 minutes «Alors tu es dans ce lycée technique ? Mais il y'a une large majorité de garçons. Ça va quand même sans beaucoup de filles ?» «Oh oui, justement, ça me fait les pieds !!». Plus tard, mon prof de technologie que j'ai eu 4 ans. En retournant là bas j'espérais voir 3 profs : lui, et deux profs de ma 3eme, celui d'anglais et celle d'SVT. Il marche vite et ne me voit même pas. Je bondis du banc en criant un bonjour. Il a l'air content de me revoir, on discute 35 secondes chrono, puis il me dit «Je suis désolé, je dois aller voir la principale mais si tu es toujours là à 17h on pourra discuter». De toute façon c'était mieux que la conversation soit courte, depuis que j'ai remis les pieds ici, à chaque question qu'on me pose, je réponds à la précédente (ouais j'suis bonne pour aller jouais au Burger Quiz, je sais...).
Je suis restée 1h30 et j'ai revu une tonne et une tonne de profs. Certains ne m'ont pas reconnue, et je n'ai même pas cherché à engager la conversation : la prof de français de 6ème et 5ème, déjà qu'elle ne me reconnaissait pas lorsque j'étais en 4ème... Mon prof d'histoire de mes 2 ans de 4ème, celui que j'aurais écartelé ou brûlé sur un bûché avec tant de plaisir pendant ses cours sur les anciennes peines de mort (et pendant tous les autres aussi). Ma prof d'SVT que je suis allée voire à la fin de son cours, qui semblait n'avoir rien à fouttre de moi, alors que je l'aimais tellement... Le prof d'anglais qui m'a reconnue au dernier moment, et qui m'a tant faite rire. Mes 2 profs de français des 2 dernières années, qui ne s'étonnent absolument pas de ma réussite en français. La prof d'espagnol qui me demande comment se passe le lycée «Heuu, le lycée ça va. L'espagnol... Ça va pas...» «C'est de ma faute, je suis une mauvaise prof, je suis désolée», et elle a raison. Mais question de politesse, parce que je suis très polie moi, je lui réponds que c'est faux. Le prof de technologie qui ne repasse pas... Les profs de maths, apparemment tous absents, halleluia !! Et les autres, sport, science physique... Y'a aussi les toilettes des filles, avec tous mes mots qui ont été camouflés sous une nouvelle couche de peinture, snif. Et la cerise sur le gâteau, la CPE qui me demande comment je vais. Elle se rappelait de mon prénom, hé tu parles, le nombre de fois où j'ai pu me retrouver dans son bureau...

Ça fait quand même bizarre, tous ces gens que j'ai toujours considérés comme supérieurs. Aujourd'hui égaux à moi, qui me font la bise, qui me racontent leurs vies, leurs anecdotes d'internat...